Ça fait un moment que le tract d'Étienne Klein me titille (pas le temps de le lire avant fin août de toute manière). Je le veux en papier, pour deux raisons :
- Voir le « nouveau » format de Gallimard, s'il y a des choses à en tirer.
- Le prix de l'epub est le même.
Prix du fascicule : 3,90 €. Ok. Quelles sont les options ? Gallimard les liste sur sa page : http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Tracts/Le-gout-du-vrai
- Amazon : pas en stock, faudra passer par des libraires indépendants avec 4 € de frais de port.
- Cultura : pareil, ou retrait en magasin à 3 € (wtf)
- Decitre : mêmes frais de port ou retrait gratuit en librairie.
- LesLibraires : colissimo à 6 € ou retrait en librairie.
Ok, sachant que la librairie la plus proche est à 20 min de bus, on est sur du frais de port similaire, sauf que c'est moi le porteur. Reste la Fnac. Qui force à mort sur le retrait en magasin (pareil, 20 min de bus), au point que t'as pas l'impression de pouvoir te faire livrer. Il y a rien sur la page qui offre cette option, j'ai failli abandonner.
Mais en fait faut VALIDER la commande pour ensuite choisir la livraison. Et là, effectivement, la livraison est à 1 centime d'euro.
Me voilà donc à devoir acheter dans une enseigne dont je n'aime pas les pratiques commerciales plus que douteuses :
Donc je me pose la question : c'est quoi ce bazar ? Parce que de ce que je vois, le tract en question c'est 16 feuilles A4 pliées en deux et agrafées. Que ça coûte autant, à la limite pourquoi pas, au pire ça donne un bon exemple d'une chaîne de valorisation capitaliste imbécile. Mais qu'un truc aussi simple – qui s'envoie en lettre suivie pour 2 € et qui s'apparente à ces dossiers qui s'échangent par milliers chaque jour dans les administrations publiques comme privées – demande plus que son prix pour faire les quelques kilomètres qui le sépare du lecteur final, après avoir parcouru toute la chaîne de distribution, tout cela dans une période de crise écologique et sanitaire… Il y a que moi qui trouve ça délirant ?
Je dis pas tout ça pour me plaindre du prix final. Mais regardez comme un objet aussi basique suffit à révéler la complexité du système du livre, son inertie et parfois son absurdité face aux enjeux contemporains. Pour un tract qui se veut « de crise », c'est ironique.
Parce que oui, Gallimard aurait pu mettre six clampins à fourrer des enveloppes toute la journée (je l'ai fait, je dénigre pas), mais ça aurait court-circuité les distributeurs et les librairies. Pareil, on aurait pu penser un système en réseau digne du nouvel esprit capitaliste, avec de l'impression à la demande dans de petites imprimeries locales qui se chargent d'envoyer en lettre suivie. La simplicité du format permet cette disposition. Mais encore une fois, c'est toute la structure qui est mise à mal, et ça passerait pas au niveau de l'un des intermédiaires historiques de l'édition. Alors on continue comme avant, mais sur du papier recyclé attention !
Donc j'en veux pas à Gallimard. Comme j'en veux pas aux librairies, petites ou grosses, qui ne peuvent livrer qu'à un certain prix.
Mais voyez, vous pouvez avoir les meilleures raisons au monde, le résultat est le même : il aurait été plus simple, moins coûteux sur tous les plans, et largement plus avantageux financièrement pour lui que je demande directement à Klein sa copie pour l'imprimer chez moi. Même si ce n'est l'intention de personne dans cette affaire, le couperet est assez sec : tout cela a rendu la transmission d'une pensée plus ardue et moins directe. Des barrières ont été érigées sur l'accès à un savoir, contribuant à rendre toujours plus prégnante la force de ce titre : La vérité est derrière un paywall, mais les mensonges sont gratuits. Peut-être est-ce cela, également, qui participe au goût du vrai.
https://www.currentaffairs.org/2020/08/the-truth-is-paywalled-but-the-lies-are-free/
Lu dans le train. Sur le fond, c'est une réorganisation de sa conf de février 2019 : https://www.youtube.com/watch?v=b7ScsY9jStw
Du coup l'avoir écoutée avant en faisant la vaisselle était pas la meilleure des idées, vu qu'on y retrouve presque tout, jusqu'aux citations.
Il y a quelques points qui sont plus élaborés dans l'un ou dans l'autre. Est-ce que ça veut dire que ça ne sert à rien de lire Le goût du vrai ? Non. C'est un bon tract à relire de temps en temps lorsque l'on vient à tort vous accuser de scientisme.
Sur la projection dans l'avenir, c'était un thème de son dernier passage chez Thinkerview. Le relier à Nietzsche est effectivement intéressant et offre une perspective de travail aux esprits scientifiques.
Les quatre biais présentés au début sont à garder en tête, limite chaque fois que vous vous exprimez (en tout cas c'est ce que je m'efforce de faire, à des degrés divers, depuis ma plus tendre enfance).
La fin est convenue, mais si ça permet aux critiques de Descartes d'aller lire Descola, ce sera pas un mal.
Il y a beaucoup plus à en dire. Du tract comme de la conférence. Mais ce sera pour une autre fois.
Bon, on peut ajouter cette conférence sur l'avenir pour avoir un panorama plus large de ce qui est abordé ici : https://www.youtube.com/watch?v=LF6ZxiBN4Ek