Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron): "Ce 1er mai ne ressemble à aucun autre. Et pourtant, c'est bien grâce au travail, célébré ce jour, que la Nation tient." / Twitter

Alors. « Chamailleurs » c'est un euphémisme de cour de récréation. C'est oublier l'origine de la journée internationale des travailleurs, fête des luttes sociales.

Mais le reste est à l'avenant. Macron entérine le projet pétainiste puis sarkozyste de confondre journée des travailleurs et fête du travail. Le discours de Pétain du 1er mai 1941 à Commentry est assez clair : il s'agit d'évincer les communistes en sortant de la lutte des classes, en célébrant le travail uni et non les travailleurs en lutte contre les employeurs et l'État. Le travail est défini par Pétain comme « naturel », l'acte « le plus digne et le plus noble ». C'est ce que répéterons tous les Présidents, la plupart des politiques : la dignité se trouve dans le travail, il faut donc célébrer ce travail qui libère, qui rend digne.

Chirac dans une interview un 14 juillet (ce devait être en 2004 mais flemme de retrouver ma source) a relancé cette idée du travail naturel correspondant à un effort. C'est repris par Sarkozy, mais surtout par Macron dans ses deux discours au Parlement réuni à Versailles.

Du côté de la gauche, on a gardé également l'idée du travail comme dignité (Hollande et Mitterrand dans leurs discours respectifs à l'OIT), parce que ça rentre bien dans le cadre de la lutte des classes contre des caricatures de patrons feignants.

Petite astuce pour Hollande : il reprend le travail qui libère de Sarkozy, ce qui permet à Macron de l'utiliser de deux manières différentes dans les deux discours de Versailles.

Alors on peut célébrer le travail sans être pétainiste, sans être de gauche et sans être de droite.

Reste qu'à la base c'était une journée de luttes sociales. Maintenant, on mange des merguez et on achète du muguet selon une tradition monarchiste remontant à la Renaissance. À vous de voir, mais perso je suis bien plus attaché à des travailleurs luttant pour RÉDUIRE le temps de travail, plutôt qu'à une célébration du travail dans une période où on travaille plus que durant les Trente Glorieuses.

(Faites le calcul : à mesure que le nombre d'heures de travail annuelles décroît, le temps passé au travail croit par le recul de l'âge de départ à la retraite. Plus, et j'en ai déjà parlé, le volume de travail a diminué entre 1950 et 1988, avant d'augmenter de nouveau.)

Et avant de me traiter de feignasse, allez lire ce court mémoire : https://editions.yom.li/livres/la-lib%C3%A9ration-par-la-machine-un-regard-nietzsch%C3%A9en

Je suis pour le travail libre. La morale que vous prônez est celle qui vous emprisonne, celle que l'État utilise pour dévaluer vos salaires et vous rendre dociles.