Children’s book week, November 15th to 20th 1920, par Jessie Willcox Smith

Auto-édition : retour sur le parcours Lulu

En mars 2017, j’ai débuté l’écriture de Triste monde tragique pour, dans un premier temps, n’en faire profiter que mes amies les plus proches et ma famille. L’idée a germé de le publier en bonne et due forme, et voici donc un retour rapide sur l’auto-édition sur la plate-forme d’impression à la demande Lulu.

Un PROJEEEEET

Tout d’abord, il faut décider si l’impression à la demande est la meilleure manière d’arriver à votre livre. Vous pouvez très bien tenter les éditeurs classiques avec un manuscrit soigné, voire d’aller faire un tour sur Framabook, un éditeur en bonne et due forme qui s’occupera d’une grande partie de ce qui va suivre.

L’écriture

Il n’y a pas grand-chose à dire sur l’écriture en elle-même. Et franchement, si vous êtes là, c’est sans doute que vous n’avez pas besoin de conseils à ce sujet. En voilà néanmoins un : tapez votre texte brut manuscrit dans un fichier au format libre assez simple pour être utilisé partout. Personnellement, puisque Triste monde tragique est divisé en chapitres, puis en paragraphes autonomes, j’ai tapé chaque paragraphe dans un fichier .txt en utilisant la syntaxe Markdown quand il y avait besoin. Chaque fichier est ensuite classé dans un dossier au nom du chapitre correspondant. Simple, efficace, et lisible même sur le plus bête des téléphones portables.

Exemple de paragraphe :

L'enseignement universitaire est totalement dépassé. Il s'agit pour du personnel non qualifié de transmettre à des étudiants passifs devant le savoir. Répétez d'année en année. Qu'est-ce qui empêche de filmer vos cours ? Qu'est-ce qui vous empêche d'écrire vos cours, de le distribuer de telle sorte que vos étudiants le lisent et engagent un débat la semaine suivante ? De poster cela sur la plate-forme numérique universitaire, avec des sources et des liens pour aller plus loin¹ ? Bien sûr, cela suppose un véritable apport de l'université, en plus de d'une volonté de changer les choses.

Il y aurait alors une véritable démarche active de l'étudiant face au savoir. De plus, le support de révision serait *commun*, au lieu d'être composé de notes prises par chacun où tout le monde fait sa petite cuisine dans son coin avant le partiel. Ça rendrait également le caractère facultatif de la présence en cours magistraux beaucoup plus juste, puisqu'il est à l'heure actuelle bien difficile de récupérer des cours en cas d'absence — même justifiée.

¹ Surtout à l'ère numérique où les ressources abondent alors que dans le même temps les professeurs demandent de lire un livre bien particulier, disponible en un seul exemplaire à la bibliothèque universitaire. Aux étudiants les plus fortunés de se le procurer dans le temps imparti…

La correction

Une de mes erreurs aura été de m’atteler à la correction des paragraphes après la mise en page. Ne faites pas ça, vous perdez un temps fou. Relisez et corrigez votre texte avant toute opération de mise en page.

Pour la correction orthographique, j’ai simplement copié-collé mes textes dans un document LibreOffice, et corrigé les erreurs. Mais si c’était si simple, le métier de correcteur n’existerait plus, n’est-ce pas ? Il manque en effet la correction grammaticale, et si comme moi vous êtes nul·le en accords du participe passé, il faudra trouver une parade. Soit vous avez dans votre entourage quelqu’un qui peut s’amuser à faire cela bénévolement, soit vous avez recours à la ruse de sioux du correcteur logiciel professionnel.

Ici, j’ai trouvé Cordial qui coûte 99 € dans sa version la moins chère. L’astuce, c’est qu’une version en ligne est disponible, qu’elle est gratuite mais fortement limitée. Il vous faudra vous inscrire pour éviter la limitation quotidienne, et en sus vous devrez copier-coller des pans limités de votre texte. N’oubliez pas que ce genre de correcteur automatique doit être supervisé, vous devrez vérifier chaque erreur vous-même puisqu’il ne comprend pas le sens de vos phrases, et peut donc se tromper. Mais avec un peu de jugeote, vous pourrez corriger en moins de vingt-cinq heures un texte de 250 pages, ce qui est plus rapide que de le faire à la main. Et les accords de participe passé sont très bien supportés.

Depuis, j’ai également découvert Grammalecte qui fait un travail similaire tout en restant un outil libre et gratuit. Deux avantages à Grammalecte : le document peut être corrigé d’une traite, et l’outil s’occupe également des subtilités typographiques.

La mise en page

Là encore, tout dépend des goûts de chacun·e. Vous pouvez utiliser LibreOffice, Word, InDesign ou même Scribus… L’objectif est d’avoir un logiciel vous générant un fichier .pdf prêt à l’impression.

Format de page

Avant toute chose, commencez par choisir le format du livre que vous imprimerez. Lulu fournit des modèles dans un fichier .zip contenant un ensemble de conseils pour une mise en page réussie. Suivez ces conseils, ils vous permettront d’avoir des pages aux dimensions requises pour une impression optimale.

Personnellement, j’ai l’habitude de passer mes écrits imprimés par LaTeX (plus précisément XeLaTeX pour son support fluide des polices personnalisées). Il y a plusieurs raisons à cela : meilleure gestion des césures et du texte justifié, automatisation de pas mal de numérotation diverse, gestion d’une base de données bibliographique, équations mathématiques, respect assez poussé de la typographie… Malheureusement, Lulu n’offre pas de modèle LaTeX. J’ai donc passé un certain temps à en produire un qui respecte le format demandé par Lulu, je mettrai cela sur GitHub un de ces jours.

Styles

Si vous êtes sur un éditeur type LibreOffice ou Word, il vous faudra définir des styles de paragraphes, de titres, de tableaux et même de pages. Je laisse à d’autres le soin de vous expliquer comment cela fonctionne dans votre logiciel, mais comprenez bien qu’il est essentiel pour votre santé mentale et la qualité de votre document de fonctionner par styles. Il est hors de question d’appliquer un gras à la main sur chaque titre. Les styles, c’est la vie.

Avec LaTeX, la question est identique : certes vous aurez des styles prédéfinis, mais il vous faudra les personnaliser à vos goûts, et cela peut prendre du temps.

Notez que la taille du texte, et sa police d’écriture, sont importantes. Lulu conseille de toujours avoir une taille de texte de plus de 6 points, autrement des problèmes d’impression peuvent survenir. La taille doit être adaptée à une lecture confortable : d’après certaines règles typographiques, il est souvent conseillé d’avoir entre 60 et 90 caractères par ligne. Quant à la police, les conseils habituels sont de mise : une police dont vous avez les droits, qui s’accorde au texte, et parfaitement lisible.

Et on copie, et on colle

Cette étape est l’une des plus simples : on copie un texte brut dans le document, on applique un style, et on recommence jusqu’à ne plus avoir de texte brut à copier. Si vous faites comme moi et utilisez Markdown dans les textes bruts, veillez à bien changer à la main. Exemple : le support de révision serait *commun* devient « le support de révision serait commun ».

Cas particulier : les notes

Les notes de bas de pages qui, dans mes textes bruts, sont annoncés par ¹ sont un cas particulier sur lequel se pencher. Si vous n’avez pas de note de bas de page, cela ne vous concerne pas, bien entendu. Mais dans le cas contraire, il faudra choisir : ou bien les notes se situent en bas de la page à laquelle elles font référence, ou bien en fin de chapitre, ou alors en fin d’ouvrage dans un chapitre dédié.

Cas particulier : l’index

Si l’index des noms propres est facultatif dans un ebook, il est utile pour un imprimé sérieux. Selon votre logiciel, il faudra passer quelques heures à relire le document pour y pointer les noms propres, l’index se générant ensuite automatiquement. À placer en fin d’ouvrage.

Cas particulier : la bibliographie

Alors là… J’ai presque envie de ne pas traiter ce cas, puisqu’il est source de beaucoup de prises de tête. Tout d’abord, je conseille d’utiliser un logiciel de gestion de bibliographie, comme Zotero ou BibTeX et d’y inscrire les références au fur et à mesure de l’écriture du texte. C’est vraiment un gain de temps appréciable, et je me mords les doigts de ne pas l’avoir fait. L’alternative consiste à relire le texte et, comme pour l’index, d’y pointer chaque référence bibliographique dans le logiciel de gestion. La dernière option est vraiment déconseillée si vous avez plus d’une dizaine de références : inscription dans un fichier texte de chaque référence, puis copier-coller dans un chapitre au doux nom de « Bibliographie », avant d’y appliquer les styles qui vont bien et de classer en ordre alphabétique… Un logiciel de gestion de références vous permettra de vous passer de cette étape assez rébarbative.

Mais il faudra choisir un style pour votre bibliographie. Il en existe des milliers, regroupés en plusieurs catégories, selon que votre livre soit un essai de sciences humaines ou de physique appliquée… Il n’y a pas véritablement de consensus : on peut écrire le prénom avant le nom, ou l’inverse, ou bien ne garder que la majuscule du prénom, et le nom peut ou non être en majuscule ou petites capitales, et puis le lieu de publication peut être avant la date ou après, etc. Les plus pointilleux me diront qu’il existe des normes telles que APA, MLA, ISO 690 ou ISBD, mais ces normes ne fixent que la disposition des éléments constituant la référence, pas leur style. Doit-on mettre un point à tel endroit ou bien une virgule, ou encore deux points ? Voilà le genre de questions qui appellent à un choix de style.

L’important ici est de choisir un style et de s’y tenir. Si vous utilisez Zotero, amusez-vous à faire votre shopping sur son dépôt de styles qui contient plus de 8000 styles différents. Et BibTeX n’est pas en reste.

Corrections

Voilà, vous avez votre document, vous vous dites que tout est bon… Eh bien, en fait non. Il faut passer par une phase de relecture et de correction. Oui, votre texte est sans doute correct au niveau de l’orthographe et de la grammaire, mais qu’en est-il des doublons, des césures et de la typographie ?

Césures

Normalement, votre texte est justifié. Mais pour avoir un gris parfait, il est généralement nécessaire d’avoir des coupures de mots en fin de ligne, ou césures. Normalement, votre éditeur s’occupe de la manœuvre, mais vous devrez parfois passer derrière pour en ajouter (c’est souvent le cas avec LaTeX par exemple). Les règles régissant les césures étant quelque peu rébarbatives au néophyte, je vous conseille d’aller vérifier en ligne la coupure des mots qui vous posent problème.

Typographie

Je ne m’étendrai pas sur ce point ici, puisque je compte publier un manuel à ce sujet. Sachez toutefois que le respect des règles typographiques est une part importante du travail de correction. Parmi les erreurs les plus courantes, on retrouve les guillemets informatiques " utilisés à la place de guillemets français «», ou l’absence d’espace insécable avant une double ponctuation. Si certaines règles sont intégrées aux logiciels, d’autres demandent une relecture.

Savez-vous par exemple que est typographiquement incorrect ? Cela ne s’écrit pas avec le symbole des degrés, mais avec un o minuscule en exposant, puisque c’est une abréviation du terme numéro. Cela se corrige assez simplement en faisant une recherche dans le document.

Organisation

Tout ce travail de correction et de mise en page étant assez prenant, pour le dire gentiment, je vous conseille de l’organiser et de le planifier de sorte que vous verrez votre progression. Par exemple, voici une page tenant compte de la progression sur chaque chapitre de Triste monde tragique :

Rien ne vous empêche d’adapter ce système, l’important est de voir que vous progressez, et au final d’être certain·e que vous n’avez pas oublié un élément important. Et je peux vous assurer qu’une fois le tableau rempli de petites croix, vous ressentez un immense soulagement devant le travail accompli.

Couverture

Lulu propose trois outils pour créer votre couverture. Si vous optez pour le classique fond coloré uni avec nom et titre, c’est possible directement en ligne, y compris avec une description et une de ces photographies de l’auteur·e.

Reste que les plus puristes trouveront que ce n’est pas assez, il est alors possible de faire votre couverture vous-même dans un logiciel de DAO comme Gimp, Inkscape ou Photoshop. Dans le .zip contenant les modèles, Lulu vous aura fourni des images qui serviront de guide pour éviter que vos textes ne soient coupés à l’impression, ou bien recouverts par un code-barres.

Les règles habituelles s’appliquent ici : utilisez des images libres, pensez à inscrire au dos les droits sur l’image de couverture.

Vendre le livre

Vous avez votre fichier .pdf, votre couverture, vous êtes prêt·e à lancer l’impression sur Lulu… Attendez une minute. Posez-vous la question de votre public : voulez-vous vendre votre livre, ou simplement le faire circuler parmi vos proches ? Dans le second cas, je ne vous retiens pas, vous pouvez passer cette partie. Mais pour ce qui est du premier, bienvenue dans le casse-tête de l’administration, que je vais essayer de démêler pour vous ici.

L’ISBN

Première chose à faire : récupérer un ISBN. L’ISBN est l’identifiant unique international de votre livre, il permet aux professionnels du livre de retrouver toutes les informations nécessaires : nom des auteurs, titre, première ou seconde édition, format, etc. Bref, il est obligatoire pour les transactions.

Lulu propose d’attribuer un ISBN gratuit, voire d’en acheter un selon le pays. Je n’ai jamais essayé ces options, puisque j’habite en France. Attention toutefois : si l’ISBN a été fourni par Lulu, c’est qu’il tient lieu d’éditeur. Plusieurs options vous seront fermées par la suite si vous décidez de vendre votre livre (la vente en librairie notamment).

Si certains pays demandent de payer pour obtenir un ISBN, la France est assez sympathique sur ce point : vous pouvez récupérer un segment de plusieurs dizaines d’ISBN gratuitement. Quel intérêt me demanderez-vous ? Eh bien, chaque support de votre livre doit comporter un ISBN différent, de même que chaque nouvelle édition. En posséder un bon petit paquet vous mettra à l’abri de quémander chaque semaine un nouvel ISBN.

Pour cela, il faut se rendre sur le site de l’AFNIL, qui s’occupe de ces attributions. Vous y trouverez un formulaire à imprimer et à retourner par mail ou par courrier (choisir le formulaire de demande pour un particulier auto-éditeur). L’AFNIL vous enverra alors un segment d’ISBN (j’en ai reçu 30 par exemple) sous deux à trois semaines. J’ai eu de la chance, je n’ai eu à attendre qu’une semaine, je devais être tombé sur une période creuse.

Le formulaire est assez simple à comprendre, mais comme l’AFNIL rechigne à distribuer des ISBN à des livres en impressions à la demande, je vous conseille de suivre cette démarche pour le remplir :

Le dépôt légal

Le dépôt légal est obligatoire si vous résidez en France, dès lors que le livre sort du cadre familial et amical. Dans la pratique, il suffit d’envoyer un exemplaire du livre à la Bibliothèque nationale de France, accompagné d’un formulaire imprimé en trois exemplaires, que vous trouverez sur le site de la BnF. Encore une fois, le formulaire est assez simple à remplir, mais voyons ensemble quelques subtilités liées à l’impression à la demande :

Comme précisé sur le formulaire, l’envoi se fait dans une lettre non timbrée, une mention précisant que le dépôt légal bénéficie d’une franchise postale. Donc pas de soucis pour envoyer votre saga fantastique de 3000 pages, vous ne devrez pas vous ruiner.

Il est à noter que, aux dires de plusieurs personnes ayant contacté la BnF, si les auteurs-éditeurs en impression à la demande ne sont pas exemptés de dépôt légal, la BnF n’a pas non plus les moyens de faire la chasse aux personnes qui ne s’y plient pas. Elle va préférer se concentrer sur les plus grosses structures qui, par définition, brassent bien plus d’imprimés.

Reste qu’il est bon d’être en règle, ne serait-ce que comme argument de vente à des librairies. Le souci avec le dépôt légal dans le cadre de Lulu, c’est qu’il doit en théorie être fait au plus tard le jour même de la publication, ce qui est ici impossible : la publication vous permet de recevoir en une semaine votre premier exemplaire, celui qui est envoyé pour dépôt légal… Il faudra donc ou bien jouer avec les options de publications de Lulu (qui permettent une publication « pour soi » totalement personnelle), ou bien admettre qu’il est impossible de faire un dépôt légal le jour même de l’impression. Pensez donc à prendre un exemplaire de vérification supplémentaire pour l’envoyer à la BnF dès réception.

Pour qu’il soit accepté par la BnF, votre livre doit comporter les mentions légales obligatoires.

Les mentions légales obligatoires

Avant de lancer l’impression sur Lulu, il faut encore inscrire certaines mentions sur votre document. En France, ces mentions sont assez simples.

Dans le cas d’un livre à destination de la jeunesse, la dernière page doit également porter la mention Loi n°49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, modifiée par la loi n°2011-525 du 17 mai 2011. juste avant la mention du dépôt légal.

Le prix

Le prix doit se trouver sur la quatrième de couverture. Le souci avec Lulu, c’est qu’à moins d’éplucher ses multiples pages d’aide et de faire de savants calculs, il n’est guère possible de connaître à l’avance le prix minimum tenant compte des frais et de la part des distributeurs tiers (Amazon, etc.). Même si vous ne désirez pas distribuer sur des sites autres que Lulu, ce prix minimum en tient compte.

Or, l’étape de la couverture se trouve avant celle où l’on fixe son prix. L’astuce consiste donc à faire une couverture ne mentionnant pas le prix, continuer le projet jusqu’à arriver au prix, décider, puis reprendre à l’étape de la couverture en y apposant le prix. Certes fastidieuse, cette méthode a le mérite de fonctionner.

Le prix sur Lulu est divisé en trois parties : les frais d’impression du livre proprement dit, la part de Lulu (20 % du bénéfice) et votre part (donc 80 % du bénéfice). Mais il faut également compter la part des distributeurs tiers (jusqu’à 50 % du prix total), de telle sorte qu’il vous sera toujours plus avantageux de vendre sur Lulu que sur Amazon. Sur un ouvrage de 100 pages vendu à 6 €, vous gagnerez 1,76 € en vendant sur Lulu, 8 centimes sur les distributeurs tiers, ce qui donne cette répartition :

Vous comprenez ainsi que le prix minimum pour un tel livre ne peut se situer en dessous de 5,90 €. D’expérience, comptez 6 € pour un format poche de 100 pages, 12 € pour 250 pages, et ainsi de suite.

Ce prix est certes fixe, mais vous pourrez proposer des réductions à votre guise depuis votre espace Lulu (du moment que le prix ne descend pas en dessous du coût de fabrication). De plus, en tant qu’auteur·e, vous bénéficiez d’un rabais sur vos exemplaires de vérification : ils ne coûtent que leur fabrication.

Enfin, pour vous donner une idée, les auteurs gagnent généralement entre 8 et 12 % du prix du livre selon l’éditeur. Vous gagnerez sans doute bien plus, mais devrez assumer la fonction d’éditeur/trice, avec ce qu’elle implique en matière de promotion du livre…

Monter une entreprise

Vous allez toucher des bénéfices en vendant des livres. Lulu vous les versera chaque mois dès que leur montant dépassera les 5 €. Le choix peut être fait entre un versement par chèque, ou sur un compte Paypal. Dans tous les cas, il vous faut avoir une structure légale et déclarer tout ce bel argent aux impôts. Pour cela, deux options s’offrent à vous :

Dans les deux cas, normalement le revenu reversé par Lulu ne compte pas comme droits d’auteur, mais sont des bénéfices non commerciaux. Dans le premier cas, vous pourrez également toucher des droits d’auteurs si d’autres livres sont achetés par des éditeurs tiers (mais il faudra tout de même bien séparer les deux types sur votre déclaration de revenu), mais dans le second vous êtes considéré·e comme éditeur/trice avant d’être auteur·e. Si vous optez pour la micro-entreprise, il faudra faire attention à la catégorie dans laquelle vous êtes rangé·e : il s’agit ici d’une profession libérale, pas d’une commerciale ou artisanale.

L’impression

Vous avez terminé votre beau fichier .pdf, vous souhaitez maintenant qu’il soit imprimé. Je n’ai pas grand-chose à dire à ce sujet puisque si vous avez suivi mes conseils jusqu’ici le reste est simple.

Inscription sur Lulu

Il faut d’abord s’inscrire sur Lulu. Si vous trouvez quelqu’un pour vous parrainer, c’est encore mieux : l’impression de votre premier exemplaire de vérification vous sera offerte, et vous recevrez sans doute des conseils pour utiliser la plate-forme. En contrepartie, cette personne devrait recevoir une réduction sur votre livre.

Lancer le projet

Je ne vais pas m’étendre sur l’ensemble du processus menant à la publication, Lulu fournit un guide pour cela.

Et après ?

Si vous êtes arrivé·e jusque-là : félicitations, vous êtes un·e écrivain·e maintenant ! Bon, et après ?

Le dépôt légal, le retour

Envoyez sans tarder un exemplaire du livre à la BnF, accompagné des trois exemplaires du formulaire vu plus haut. C’est important.

L’ISBN, la revanche

L’AFNIL ne s’occupe que de l’attribution des ISBN, elle ne fait pas le lien entre tel identifiant et tel livre. Pour ce faire, il faut passer par des bases de données. Il en existe plusieurs :

La mise à jour des bases est faite tous les mois environ, il ne faut donc pas s’alarmer si votre libraire favori ne trouve pas votre livre en faisant une recherche. Dans le cadre d’Amazon, le délai est plus de 6 à 8 semaines.

La promotion

C’est-à-dire ferrer des lecteurs. Je ne vais pas vous faire un cours de marketing ici, vous trouverez d’autres conseils en quelques recherches. Le minimum étant tout de même d’en parler sur vos réseaux sociaux et à vos proches.

Il est souvent conseillé de ne pas mentionner à des professionnels du livre que le vôtre est une auto-édition. La réputation de tels ouvrages auprès des professionnels est qu’ils sont bourrés de fautes, d’une qualité médiocre, donc sans grand intérêt.

Selon les politiques d’admission de la bibliothèque de votre quartier, vous devriez pouvoir déposer un exemplaire pour archivage, en mettant l’accent sur le fait qu’il soit produit par « un·e auteur·e local·e ».

Quant aux librairies des environs, je ne sais sincèrement pas comment vous pourriez vous y prendre, à moins de recourir au bon vieux sourire charmeur. En effet, le prix du livre étant fixe, et le prix de gros peu avantageux (entre 3 % pour 30 exemplaires et 25 % pour plus de 1200), les libraires refuseront sans doute de présenter votre ouvrage dans leurs rayons. Il vous faudra donc acheter à Lulu votre stock personnel (qui ne coûte alors que le prix de fabrication, plus les frais de transport, mais où la réduction du prix de gros s’applique tout de même), puis marchander en tant qu’éditeur/trice votre mise en rayon. À vous de voir si cela vaut la peine. Pour vous donner une idée, la marge du libraire tourne entre 25 et 35 % du prix du livre en temps normal. N’oubliez pas qu’il est généralement mal vu par les professionnels du livre d’être imprimé à la demande (se plaindre de la concurrence d’Amazon et refuser des livres qui y sont pourtant distribués, un paradoxe français…).

Enfin, même principe pour les séances de dédicaces, si vous en êtes arrivé·e là : apportez votre stock, faites un communiqué de presse aux journaux locaux, voire préparez quelques affiches pour la librairie qui souhaitera vous accueillir.

Un ebook

Proposer une version sur support numérique de votre livre est assez simple, il suffira de créer un second projet sur Lulu. Deux formats ressortent : le .pdf et le .epub.

Je conseille dans un premier temps le .pdf, beaucoup plus simple à mettre en œuvre. Il suffira de reprendre votre manuscrit, d’y apporter quelques modifications mineures : suppression des pages blanches, numérotation au milieu des pages, liens hypertextes sur les éléments correspondants (comme les références bibliographiques et la table des matières). Envoyez sur Lulu, en moins de trente minutes ce sera fait.

Pour la version .epub, par contre… À moins de vous y connaître quelque peu en informatique, je vous déconseille de convertir vous-même votre manuscrit en .epub. Lulu propose un outil de conversion qui prend les fichiers Word, LibreOffice, .rtf, etc. Laissez-le faire, vérifiez bien le tout, et normalement ça ne devrait pas prendre plus d’une heure.

Si toutefois vous souhaitez faire vous-même cet .epub et que, comme moi, votre manuscrit est en LaTeX, voici succinctement la marche à suivre :

  1. Convertissez le fichier .tex en .epub avec Pandoc : pandoc -t epub manuscrit.tex -o livre.epub --bibliography bibliographie.bib --csl=style-bibliographie.csl --epub-chapter-level=2 --epub-stylesheet=stylesheet.css --epub-metadata=metadata.xml --epub-cover-image=cover.jpg. Oui, c’est ardu, RTFM.
  2. Importez votre fichier .epub dans Calibre, puis convertissez en .epub, avant de l’enregistrer en dehors. Je sais, c’est absurde, mais Calibre vous permettra de passer plus facilement l’étape de validation de Lulu.
  3. Dépackez le fichier obtenu dans un dossier nommé myepub, extrayez le fichier mimetype pour le repacker en commençant par le fichier mimetype : zip -X0 file2.epub mimetype puis cd myepub et enfin zip -X9Dr ../file2.epub *.
  4. Passez le fichier .epub obtenu dans le validateur Lulu, et corrigez toutes les erreurs.

Lulu utilise epubcheck pour valider le fichier .epub, et tant qu’il reste une erreur vous ne pourrez pas continuer.

N’oubliez pas que chaque support doit être accompagné de son ISBN unique : si vous avez un .epub, un .pdf et une version papier, vous devrez avoir trois ISBN différents.

Enfin, si la version numérique d’un livre est soumise au dépôt légal, celui-ci s’effectue par la BnF elle-même dans le cadre de son dépôt légal du web. Vous n’aurez donc, au moment où j’écris ces lignes, aucune démarche supplémentaire à effectuer de ce côté-là.

Check-list

Pour terminer, voici une check-list rapide de toutes ces étapes. Cochez les cases, vous verrez votre progression, et donc le bout du tunnel :

Me lire

Oh, et comme je suis un gros sac sans aucun sens du marketing, vous pouvez découvrir mes sublimes œuvres sur ma page Focus. Encore un service gratuit de Lulu ;)


Citer cet article : Guillaume Litaudon, « Auto-édition : retour sur le parcours Lulu », Yomli (ISSN : 2592-6683), 10 juillet 2017.